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Propositions pour une nouvelle approche de l'évaluation des enseignants
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Présenté par Jean-Marc Monteil - juin 1999
Avant propos
" Inscrire la carrière des enseignants au cÏur d'une véritable politique de valorisation des ressources humaines et d'amélioration de leur situation professionnelle " comme le ministre de l'Education nationale, de la Recherche et de la Technologie en exprime la volonté " en accordant une attention particulière aux problèmes de notation notamment pédagogique ", conduit à s'interroger à la fois sur le processus d'évaluation lui-même, en tant que support de la notation, et plus largement sur son inscription dans une démarche de valorisation institutionnelle de ses contenus et de ses produits. Ce rapport traite successivement de ces deux points avant de formuler trois propositions principales.
I. L'EVALUATION : QUELQUES CONSTATS
Sans engager de longs développements sur le processus d'évaluation dont résulte la notation, il convient cependant d'en proposer une brève analyse. En effet, en souligner certaines des caractéristiques dominantes devrait permettre de saisir l'intérêt de modifier des pratiques parfois plus proches d'un rituel pédagogique en voie de sécularisation que d'une démarche pour repérer et apprécier des performances et des compétences.
D'abord une prise de position. Toute action, comme celle d'enseigner, qui vise à faire acquérir des connaissances et construire des compétences, suppose, pour la conduite efficace de son déroulement, d'en contrôler les effets.
L'évaluation dont la vertu première est de permettre la confrontation d'un résultat à un objectif s'impose donc comme une nécessité. Cela ne va cependant pas sans entraîner quelques confusions. La distinction, par exemple,
entre évaluation sommative et évaluation formative dans la pratique, la plupart du temps mal assurée, est une source de réelles difficultés. En effet, la première a pour but de fournir un bilan (la situation du professeur) et de concourir à une décision (promotion au choix ou pas, passage ou non à la hors-classe), la seconde a pour finalité d'informer l'enseignant sur l'état de ses méthodes didactiques ou pédagogiques et donc de lui permettre d'en corriger ou d'en modifier le cours. Dans la réalité on assiste à une confusion des deux voire à une contamination de l'évaluation formative par l'évaluation sommative.
Ensuite quelques constats. Quel jeune enseignant n'a pas souhaité pour ses premières inspections " tomber sur le bon inspecteur " ; celui qui saura l'apprécier à sa juste valeur, celle, bien entendu, qui lui vaudra " un bon départ dans la carrière ". Un tel souhait est probablement moins irrationnel qu'on pourrait le penser. Certaines analyses montrent assez clairement des divergence inter-évaluateurs comme intra-évaluateur. Les explications de ces phénomènes de divergences méritent que l'on s'y attarde. L'évaluation est un comportement et, comme telle, elle relève d'un certain nombre de déterminants susceptibles d'avoir des effets sur le jugement et la prise de décision. Ces effets dits effets de source sont nombreux (les professeurs y sont d'ailleurs quotidiennement soumis dans leur propre pratique d'évaluation des performances de leurs élèves) aussi suffit-il ici d'en fournir quelques exemples.
Ainsi la connaissance de la note antérieure (ou des éléments du rapport) influe-t-elle sur la note actuelle par un effet d'assimilation qui conduit à une réduction de distance entre la note antérieure et la note virtuelle. Le fait d'être inspecté en présence d'une bonne classe ou d'une mauvaise classe n'induit pas nécessairement le même jugement. De même, certains résultats de travaux indiquent, toutes choses égales par aileurs, des différences de notation entre hommes et femmes. Bien réelles, ces distorsions évaluatives ne doivent cependant pas laisser croire à une quelconque incompétence intrinsèque des évaluateurs.
Simplement, confronté à une situation de jugement, l'évaluateur traite cette situation en fonction des informations dont il dispose et qui peuvent tenir tout autant aux caractéristiques de la situation scolaire elle-même qu'aux caractéristiques sociologiques ou psychologiques des personnes évaluées. Ces informations dont il dispose a priori provoquent chez lui des attentes spécifiques. Dès lors son attitude dans le recueil d'indices vise à relever les occurrences en accord avec ses attentes ; attentes qu'il a élaborées à partir de l'univers de référence. Aussi peut-on penser que l'acte d'évaluer est gouverné autant sinon plus par ce que l'évaluateur " a déjà dans la tête " et les situations dans lesquelles il est placé, les deux choses étant souvent liées, que par les compétences exprimées par la personne à évaluer. Dès lors les informations préalables (souvent mauvaises conseillères) favorisent l'élaboration d'une représentation qui, à son tour, déterminera des attentes qui elles-mêmes joueront le rôle de sélecteur d'indices dans l'appréciation des comportements, Alors, la connaissance du rapport antérieur, l'information par un collègue qui " connaît bien " le professeur à évaluer doivent-elles être bannies ? Certainement pas, mais qu'elles adviennent après l'évaluation, et la notation et les appréciations y gagneront en objectivité.
Enfin, et sans entrer dans une analyse approfondie qui déborderait le cadre de ce rapport, il convient de souligner clairement certaines extrapolations abusives attachées à l'évaluation. Ainsi existe-il, à partir des performances observées, une tendance à inférer des caractéristiques morales (capable d'effort) ou intellectuelles (inventif), cela à travers l'emploi de traits de personnalité (dont le réservoir lexical est pratiquement inépuisable). Ce phénomène de psychologisation (cela fonctionne remarquablement également sur les bulletins trimestriels des élèves où, à partir d'une performance, on fait souvent une inférence personnologique) ne recouvre aucune réalité scientifique. Ces traits de personnalité ne rendent pratiquement jamais compte d'une consistance effective des conduites. Aussi faut-il s'attacher à en contrôler l'utilisation, d'autant qu'inscrits dans un rapport, ils fonctionneront comme information préalable générant des attentes qui conduiront l'évaluateur à s'engager dans la confirmation d'hypothèse.
Savoir que l'on peut être à ce point influencé dans ses évaluations devrait-il
conduire au refus d'évaluer ?
Certainement pas, quelles que soient les conceptions que l'on peut avoir par ailleurs, il
ne saurait y avoir d'assignation d'objectifs sans contrôle de leur évolution et de leur
atteinte. Nos sociétés n'étant pas particulièrement vouées aux déclins des
hiérarchies, au moins fonctionnelles, le jugement en demeure la clef de voûte. Dès
lors, autant qu'il porte son nom et que l'équité en soit la règle. C'est pourquoi
s'imposent à l'égard des pratiques évaluatives, corrections et améliorations et ceci
aussi bien dons leur forme que dans leur contenu.
II. L'EVALUATION : D'UNE APPROCHE INDIVIDUELLE Ë UN ENRICHISSEMENT COLLECTIF.
S'il s'agit bien de traiter de l'évaluation du professeur dans le but d'apprécier ses performances et de repérer comment il exprime au profit des élèves et de la classe les compétences acquises, il faut également envisager les apports éventuels de ce même professeur à l'évolution des méthodes et pratiques pédagogiques dans le cadre plus général d'une réflexion permanente sur l'acte d'enseigner et d'apprendre, comme sur celui d'éduquer et de former, voire celui de gérer et d'entreprendre. En effet, hormis le temps de l'entretien (ce fameux colloque singulier entre le professeur et l'inspecteur), rien ne permet de retenir et encore moins de faire partager à une communauté disciplinaire ou pluridisciplinaire les interrogations, les réflexions, les réussites voire les échecs attachés à la vie de la classe, à la transmission des savoirs, à la nature des programmes, aux dispositifs logistiques, etc., c'est-à-dire à tout ce qui constitue les supports de l'expertise du professeur dans et au-delà de la classe.
Ce n'est pas disqualifier une pratique que de juger la relation d'inspection parfois infantilisante en soi et assez faiblement productive. Inscrite dans un temps et un espace limités, elle détermine en fait un moment d'évaluation sommative plus que formative. Les conseils de l'inspecteur ou de l'inspectrice, aussi avisés et pertinents soient-ils, demeurent assez largement contingents à la séquence pédagogique considérée. Or, la richesse et la complexité de l'acte d'enseigner ne sauraient être rendues à travers les seules expressions d'une leçon en temps limité et d'une brève interaction subséquente entre l'acteur et l'observateur. De plus, la séquence pédagogique observée, même si elle est convenablement resituée dans un ensemble de programmations et de progressions pédagogiques, ne peut véritablement rendre compte des moyens mis en oeuvre pour traduire dans le temps les objectifs généraux du programme en objectifs pédagogiques.
Si l'on ajoute à ces contraintes objectives celles liées à la charge considérable des corps d'inspection qui doivent " gérer " un nombre de professeurs tel qu'il interdit pratiquement toute relation suivie, on est naturellement conduit à souligner le caractère quasi anachronique de l'inspection telle que les cadres pédagogiques de l'Education nationale sont amenés à la pratiquer. Ces difficultés objectives ne sont cependant pas dirimantes pour la pratique évaluative. Elles peuvent en effet être levées, au moins en partie. Nous y reviendrons lors de la présentation des propositions.
C'est pourquoi il convient de rappeler deux points essentiels. Le premier tient à la réaffirmation de la nécessité d'observer le professeur dans le cours de son enseignement et donc de maintenir dans l'évaluation la dimension fondamentale de l'appréciation de l'action d'enseigner. En effet, dons un souci de correction ou d'évolution de ses pratiques, celui-ci a besoin de bénéficier d'un retour d'informations qui viendront compléter celles qu'il produit lui-même à travers l'évaluation des apprentissages et des performances de ses propres élèves. Bien qu'attachée à une séquence pédagogique donnée, c'est dans ce retour d'informations que la fonction d'inspection (dont on verra les aménagements éventuels plus loin), puise une part importante de son sens.
Le second point engage, lui, une perspective un peu nouvelle de l'évaluation des pratiques pédagogiques et de l'expérience acquise. Chaque professeur, quelle que soit sa discipline, se trouve, dans l'exercice de son enseignement, confronté à différents programmes, à des groupes d'élèves de niveaux de compétences cognitives variés et à des attitudes et comportements sociaux parfois très contrastés. La gestion de cette diversité fait en quelque sorte le quotidien de l'exercice professionnel des enseignants. Elle se nourrit de réponses ou de systèmes de réponses adossés à des réflexion, des analyses, des méthodes voire des " tours de main " probablement également variées et qui sont tous orientés en direction de la réussite des apprentissages des élèves. Or aucune forme organisée d'évaluation ne permet d'en rendre compte. Dès lors, nul espace institutionnel n'est susceptible d'en saisir et d'en utiliser la richesse éventuelle au profit de l'ensemble de la communauté des enseignants tout entière.
C'est pourquoi il est probablement urgent de concevoir une approche plus positive de l'évaluation des professeurs en l'abordant sous un double aspect. Ainsi devrait-elle permettre à la fois d'observer et d'apprécier (comme aujourd'hui mais avec une évolution du dispositif, cf. infra) les pratiques d'enseignement telles qu'elles s'expriment en situation, et de retenir et de mettre à profit les réflexions, les analyses, les propositions des professeurs liées à la vie de leurs classes, à la réalité des programmes et à celle de leur mise en Ïuvre. L'évaluation prendrait dès lors, à partir d'un fondement individuel, une véritable dimension collective. Les expériences de chacun seraient de cette façon susceptibles de fournir le matériau d'un patrimoine d'expertises, didactiques et pédagogiques, effectivement partagé.
III. L'EVALUATION : TROIS PROPOSITIONS LIEES
1. Pour traduire les éléments avancés sous Il un premier principe de base de l'évaluation des professeurs devrait reposer sur la production d'un rapport d'activité tous les trois ans. L'instruction en fournirait le thème principal, l'éducation et l'administration les thèmes éventuellement associés.
1.1. L'instruction (enseigner et apprendre)
Sous cette rubrique le professeur décrirait, analyserait et mettrait en perspective les savoirs dispensés. Il serait ainsi invité à formuler un point de vue sur les contenus et les niveaux de complexité des programmes.
Il analyserait de même, à travers les caractéristiques de ses élèves et de ses classes, les difficultés éventuelles d'apprentissage des premiers et les conditions d'organisation, facilitantes ou non des secondes. Cette production du professeur serait à considérer comme une contribution à une réflexion collective sur la discipline et les situations pédagogiques pour la définition et le suivi des projets d'enseignement. Un conseil des études propre à chaque établissement pourrait pour une part utilement se nourrir de ce type de contribution. Une telle démarche permettrait tout à la fois de favoriser un engagement plus collectif du professeur dans le processus d'enseignement, en prenant institutionnellement en considération son expertise, et de fournir des éléments d'évaluation sur sa compétence à rendre compte et à analyser une pratique.
1.2. L'éducation.
Il s'agirait ici de rapporter sur d'éventuelles actions accomplies dans le but de faciliter ou d'accompagner les apprentissages ou le développement social, individuel et collectif, des élèves. Ce type de contribution pourrait, là encore, nourrir la réflexion et les projets liés plus largement à la vie scolaire dans les établissements. En effet, dans le cadre même de leur enseignement les professeurs
sont en mesure de repérer, au-delà des démarches et performances cognitives des élèves, des dimensions de comportements et de conduites sociales, individuelles et collectives, utiles pour faire évoluer les dispositifs éducatifs des établissements.
1.3. L'administration.
Dans ce domaine il conviendrait d'indiquer et d'analyser les éventuelles responsabilités collectives assumées en relation avec l'instruction et l'éducation. Ce type de contribution éventuelle serait susceptible d'apporter de précieux éclairages pour l'organisation pédagogique et sociale qui structure une part significative des projets d'établissement.
Le rapport constituerait la base d'un entretien ouvert et approfondi avec le professeur qui associerait les inspecteurs concernés et le chef de l'établissement. En effet, conçu comme un espace de partage entre différents acteurs de l'enseignement, il permettrait, a partir de l'expression même du professeur et par la confrontation des points de vue, de mieux appréhender et donc de corriger éventuellement certains aspects de l'acte d'enseignement et plus largement de son organisation. Outre son apport éventuel aux différents projets disciplinaires et interdisciplinaires ou/et aux projets d'établissement ( cf. supra) il permettrait d'éclairer, notamment par l'entretien dont il serait le support, " la note administrative " qu'il appartient au chef d'établissement de porter.
Le second principe de base de l'évaluation correspondrait à l'observation de séquences d'enseignement et représenterait l'inspection pédagogique proprement dite, support de la note pédagogique dont l'attribution reviendrait évidemment à l'inspecteur de la discipline Cette observation conduite par deux inspecteurs pourrait impliquer que l'un des deux soit extérieur à la discipline. Il s'agirait ainsi de croiser un regard lié à la discipline avec un autre plus orienté sur les aspects transversaux de l'acte d'enseigner. Par cette double présence, on faciliterait l'engagement dans l'élaboration d'une culture plus collégiale de la fonction d'inspection, on atténuerait également les risques de psychologisation, et certains effets de source (cf. supra 1) tout en favorisant éventuellement une interaction post-observation plus riche parce que nourrie de points de vue différents. En effet, l'entretien avec l'enseignant pourrait avoir lieu aussi bien avec le seul inspecteur de la discipline qu'avec les deux selon la décision même du professeur.
L'intérêt principal d'une approche de l'inspection pédagogique par des inspecteurs de disciplines différentes tient à son aspect formateur pour les corps d'inspection et donc à la possibilité de rendre plus homogènes les pratiques d'évaluation pédagogique entre disciplines. Ainsi une telle approche permettrait-elle, par l'acquisition de représentations partagées, de minorer les différences éventuelles de traitement entre les professeurs de disciplines différentes sans pour autant affaiblir le jugement disciplinaire qui continuerait à appartenir au seul inspecteur spécialiste.
Par ailleurs, les évaluations qui feraient apparaître des difficultés devraient conduire les évaluateurs à formuler des propositions concrètes de formation à visée corrective ou auto-corrective. Cette exigence suppose qu'au-delà de l'aide et des conseils prodigués au cours de " l'entretien pédagogique ", le rapport soit communiqué très rapidement au professeur concerné de telle sorte que les actions envisagées fassent l'objet d'une collaboration par l'inspecteur et le professeur. Ces propositions, associées aux contributions des professeurs dans le cadre de leur rapport d'activité, seraient, dans de nombreux cas, susceptibles de nourrir plus largement pour la discipline elle-même le cahier des charges du plan académique de formation.
Dans la mesure où le rapport d'activité recouvre également l'objectif de contribuer de manière majeure à la réflexion et à l'action collective sur l'instruction et l'éducation, sa production triennale devrait être considérée comme obligatoire jusqu'au terme de la carrière. En effet, constamment enrichie, l'expérience du professeur doit pouvoir faire l'objet d'une relation continue qui permette de saisir la perception des évolutions de l'enseignement, On peut, par contre, considérer qu'après un certain nombre d'années d'exercice (par exemple l'équivalent de six inspections à raison d'une tous les trois ans, sans compter les quatre premières années d'enseignement, (cf. infra) l'observation du professeur au cours de son enseignement ne soit plus réalisée qu'à sa demande ou à celle de l'établissement.
2. Les professeurs débutants ne feraient pas l'objet d'une notation avant la fin de leur deuxième année d'enseignement comme titulaires.
Au cours de ces deux premières années ils bénéficieraient de l'aide d'un tuteur choisi parmi les collègues de leur discipline. Un même tuteur prendrait en charge deux jeunes collègues. L'ensemble des tuteurs d'une discipline devrait être placé sous la responsabilité pédagogique de deux inspecteurs (dont l'un n'appartiendrait pas à la discipline) et d'un formateur IUFM ou accrédité comme tel.
Au terme des deux années les professeurs débutants seraient soumis à leur première évaluation selon un processus identique à celui appliqué à leurs collègues plus anciens (rapport, entretien, observation au cours de l'enseignement). Leur deuxième évaluation pédagogique (qui devrait avoir lieu dans les deux années suivantes) engagerait (dans le but d'éviter les effets de source, cf. supra 1) obligatoirement deux inspecteurs différents de ceux qui auraient assuré la première. En effet, le caractère référent du début de carrière réclame toutes les attentions. Il faut impérativement aussi bien favoriser pleinement et très vite l'expression des qualités par des renforcements pertinents et variés que corriger, selon les mêmes modalités et tout aussi rapidement, des insuffisances éventuelles sans pour autant courir le risque de les stigmatiser, Cette approche nouvelle du suivi des professeurs débutants par des tuteurs, eux-mêmes animés par les corps d'inspection, constituerait une excellente façon de promouvoir une réflexion collective organisée au sein d'une discipline ou entre plusieurs disciplines d'enseignement.
Elle favoriserait également une prise en considération plus réaliste des besoins de formation des enseignants et devrait donc être utilisée pour alimenter, ici encore, le cahier des charges de la formation continue.
3. Pour être cohérente et efficace, la réalisation des propositions précédentes impliquerait un certain nombre d'évolutions d'ampleur non négligeable.
D'abord un accroissement très significatif du nombre des inspecteurs. En effet, outre le suivi plus régulier qu'imposerait une évaluation triennale, les inspecteurs sont les seuls cadres physiquement mobiles de l'Education nationale et donc des acteurs majeurs de la diffusion et du suivi des politiques académiques.
Par ailleurs, la nouvelle approche de l'évaluation envisagée leur confère une responsabilité accrue dans la mesure où elle les conduit à s'engager plus avant dans leurs relations avec les établissements et dans des actions de nature plus interdisciplinaires voire
pluridisciplinaires, donc plus collégiales. Enfin, cette approche à la fois plus collective et plus orientée vers une conception formative de l'acte d'évaluation/inspection impose une connaissance approfondie des caractéristiques des établissements d'enseignement par les inspecteurs. Dès lors, chacun d'entre eux devrait disposer des données synthétiques (résultats scolaires, configurations sociologiques des populations d'élèves, etc.) régulièrement mises à jour des établissements de leur domaine territorial. De même, il conviendrait de concevoir et de diffuser un référentiel de l'inspection qui permettrait à chacun (inspecteurs et enseignants) de partager un petit nombre d'indicateurs pédagogiques objectifs permettant de situer minimalement l'acte d'enseigner et les comportements qui lui sont en principe attachés sans en aucune manière établir un système de normes.
Il faut aussi, dans la formation des personnels de direction et dans celle des personnels d'inspection introduire un programme résolument axé sur les méthodes d'évaluation (cette exigence vaut aussi pour les enseignants dans le domaine de l'évaluation scolaire) mais aussi et surtout sur l'évaluation comme mode de gestion positive des ressources humaines (à condition d'éviter les " faux experts ", on sait aujourd'hui sur ces sujets suffisamment de choses pour " outiller " convenablement les principaux acteurs concernés par de tels dispositifs).
En effet, accorder à l'évaluation formative une place majeure dans le processus de suivi de l'enseignement et des enseignants suppose une nouvelle culture qui intègre pleinement le souci constant de créer les conditions d'évolution et/ou de correction des pratiques notamment à travers le repérage des besoins en formation et la capacité à co-élaborer avec les enseignants eux-mêmes les programmes d'action susceptibles de les prendre en compte. De même faut-il pouvoir, à l'occasion de situations plus difficiles, être en mesure de concevoir des actions d'intervention plus lourdes voire de reconversion.
Ensuite, s'agissant des jeunes enseignants débutants, il conviendrai de concevoir le tutorat comme une activité qui ne saurait devenir une fonction mais qui au contraire devrait faire l'objet d'une forte mobilité. Il constituerait ainsi à La fois l'aide pour laquelle il est conçu et un excellent moyen de formation continue dans une perspective " intergénérationnelle ". Ce rôle de tuteur, associé étroitement à l'animation des inspecteurs, fonctionnerait en quelque sorte comme un système de veille pédagogique. Compte tenu de son importance il réclamerait pour les enseignants qui l'assumeraient la mise en place d'un allégement de service.
Enfin, pour exploiter pleinement une nouvelle démarche positive de l'évaluation la création au sein des établissements d'un conseil des études, présidé par le chef d'établissement, se révélerait singulièrement opportune. En effet, reconnaître, comme il est légitime de le faire, l'expertise des professeurs et leur capacité à en rendre compte suppose que l'on soit en mesure d'en retenir et d'en exploiter les résultats. C'est pourquoi la procédure du rapport d'activité devrait être mise au service de projets collectifs disciplinaires et multidisciplinaires dans le cadre du volet pédagogique du projet d'établissement, lui-même situé dans un projet académique dont l'objectif s'inscrit naturellement dans la mise en Ïuvre des grandes orientations nationales.
IV. POUR CONCLURE
C'est une triple préoccupation qui structure les réflexions et propositions de ce rapport.
D'abord celle de permettre l'expression de la diversité des pratiques enseignantes en fonction des publics qui leur sont confiés mais aussi en fonction de leur propre démarche d'innovation, de recherche, d'adaptation à partir des contenus de programme qu'ils dispensent. Cela dans le but de favoriser au sein des disciplines, entre les disciplines et dans les établissements la constitution d'un patrimoine commun de savoir-faire. Le rapport d'activité et le conseil des études en sont les instruments privilégiés. Le premier favorise l'expression personnelle et ouvre, à travers l'entretien, un espace institutionnel d'échanges pédagogiques pas si fréquents dans notre système d'enseignement. Le second crée les conditions d'une mise en oeuvre collective d'actions et de projets pédagogiques disciplinaires et multidisplinaires d'établissement.
Ensuite celle de fournir aux jeunes enseignants débutants les conditions d'aide indispensables pour favoriser l'expression rapide de leur qualité ou pour réduire en temps quasi réel les difficultés qu'ils peuvent éprouver dans la solitude de leur classe. Le dispositif de tutorat répond (à cette préoccupation tout en permettant de construire une culture de veille pédagogique susceptible d'alimenter concrètement les cahiers des charges de la formation continue.
Enfin, la dernière grande préoccupation est liée à la nécessité d'associer fonctionnellement beaucoup plus étroitement les corps d'inspection et les personnels de direction. En effet, la caractère mobile et spécialisé des premiers et le niveau de responsabilité des seconds dans la mise en oeuvre locale de la politique éducative nationalement définie et académiquement traduite suppose des références plus largement partagées. Ce dernier objectif ne confond en rien le rôle des uns et des autres, Le caractère disciplinaire de l'inspection et la dimension organisatrice locale des établissements se complètent naturellement, les différentes propositions avancées ne conduisent pas à dissocier formellement évaluation et notation. C'est pourquoi il est proposé de conserver Ici natation administrative et la notation pédagogique dans un rapport qui pourrait être d'équivalence. Cependant, sans engager de bouleversement en cette matière, le processus d'évaluation tel qu'il est redéfini ici offre l'intérêt d'introduire une culture plus formative que sommative dans les pratiques d'évaluation, notamment en faisant de l'évaluation un des facteurs contributifs des plans de formation. Par ce biais, l'aide et le conseil, particulièrement pour les jeunes enseignants, se trouvent dès l'origine du processus d'évaluation posés comme un objectif permanent et non plus seulement comme la conséquence d'une insuffisance observée à un moment donné.
Les problèmes liés à l'évolution même du dispositif de déroulement de carrière n'ont pas été abordés ici.
Probablement relèveraient-ils d'une approche plus spécifique. La réflexion proposée s'inscrit donc essentiellement dans le souci de fournir les bases d'une évaluation des enseignants qui permettent de mieux prendre en compte la diversité et la richesse de leurs expériences, en même temps que de leur fournir la possibilité de trouver des réponses institutionnelles à leurs difficultés éventuelles. La poursuite de ce double objectif devrait, en soi, déjà infléchir les pratiques actuelles et donc susciter, voire indiquer, des pistes de réflexion pour prendre en compte cette nouvelle donne dans l'évolution du dispositif.
Enfin, s'agissant des inspecteurs leur nécessaire installation dans une double compétence d'évaluateurs pédagogiques et de cadres vecteurs des politiques académiques, déclinées à partir des orientations nationales, implique, outre un accroissement de leur nombre, probablement un mode de recrutement et de formation sinon plus exigeant du moins beaucoup plus orienté en direction d'une connaissance et d'une maîtrise de haut niveau d'ensembles plus vastes que les ensembles disciplinaires, lesquels demeurent évidemment fondamentaux.
LUniversité Syndicaliste, suppl. au n 505 - 9 octobre 1999, hebdomadaire du Syndicat national des enseignements de second degré (F. s. u.), 1, rue de Courty, 75341 Paris Cedex 07 - Directeur de la publication : Gérard Anthéaume - Compogravure : CAG, Paris - Imprimerie : Fava Print - Les Mureaux (78) - N CP 1578 D 73 - ISSN n 0751- 5839